Manifeste contre le racisme, de Mohand Tazerout

Manifeste contre le racisme, de Mohand Tazerout

Name: Manifeste contre le racisme, de Mohand Tazerout
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"Manifeste contre le racisme" de Mohand Tazerout analyse les idéologies racistes, mettant fin à des décennies d'études. Polyglotte et engagé, Tazerout relie le racisme au colonialisme, appelant à une décolonisation complète. Son parcours, de l'instituteur à un spécialiste des civilisations, est présenté. Le livre offre une perspective essentielle face à l'islamophobie persistante, apportant de la raison aux débats passionnés.

Manifeste contre le racisme

Auteur: Mohand Tazerout

Éditions : Héritage

Préface

C'est Subervie qui a suggéré d'intituler "Manifeste contre le racisme" cette analyse des idéologies racistes par Mohand Tazerout (1893-1973), qui avait proposé un autre titre en lien avec un précédent ouvrage théorique, déniant toute forme de scientificité à l'idée de race. La publication, en 1963, de ce manifeste met fin à plus de trois décennies d'études et de recherches, commencées à la fin des années 1930 par la traduction de l'allemand du "Déclin de l'Occident" d'Oswald Spengler, et poursuivies par l'histoire des idées des "Éducateurs sociaux de l'Allemagne" et la convocation d'un imaginaire "Congrès des civilisés".

L'installation de la France dans la guerre en Algérie l'amène à l'étude de la colonisation et de la décolonisation, dont il devient l'analyste sans complaisance et le militant qui, à défaut de participer au djihad, ouvre les portes de l'ijtihad pour décrire les institutions démocratiques de l'Algérie indépendante. Comme son ami Mohamed-Chérif Salhi, il propose de « décoloniser l'histoire » de toute l'Afrique du Nord, étudiée surtout par des vainqueurs. Pour lui, la décolonisation politique doit être complétée par celle des esprits. Le racisme, pour lui consubstantiel au colonialisme, doit être combattu pour parachever la décolonisation.

Après la parution de son dernier livre, Tazerout quitte la banlieue parisienne pour s'installer à Tanger où il a traduit le Coran en français. Cette traduction est restée inédite, mais son existence montre que pour ce penseur polyglotte passé à l'histoire universelle, le Coran mérite de faire partie de la "Bible de l'humanité" où les comtistes lui avaient ménagé une place de choix. Le parcours de cet ancien «instituteur adjoint indigène » pour « école indigène », devenu spécialiste des grandes civilisations, mérite d'être rappelé et proposé à la méditation de ceux qu'intéresse la longue histoire intellectuelle de l'Islam en France.

Au moment où l'islamophobie est devenue un avatar du racisme qui a survécu à la décolonisation politique, la lecture du "Manifeste contre le racisme" peut mettre un peu de raison dans des débats où les passions se déchaînent trop souvent.

Sadek Sellam

Quatrième de couverture

En 1914, Mohand Tazerout (1893-1973) fuit les discriminations raciales de l’Algérie coloniale, après une brève expérience d’« instituteur adjoint indigène » dans une « école indigène ». En France, il devient un germanisant reconnu. Après la parution au début des années 30 de sa traduction du Déclin de l’Occident d’Oswald Spengler, il mène des recherches pluridisciplinaires dont il publie les conclusions dans des ouvrages remarqués : L’État de demain (1936), Les Éducateurs sociaux de l’Allemagne moderne (1942-1946), Au congrès des civilisés (1953-1956). Sa connaissance de l’orientalisme allemand lui permet de traduire Histoire des peuples et des États islamiques (1949) de Karl Brockelman. La guerre d’Algérie l’amène à s’engager en faveur de la décolonisation. En 1960, il signe d’un pseudonyme L’Algérie de demain, prescrivant des institutions démocratiques pour une Algérie indépendante pluraliste.

Dans Histoire politique de l’Afrique du Nord (1961), il propose une décolonisation de l’histoire, chère à son ami Mohamed-Cherif Sahli. En 1963, il conclut la réflexion sur le racisme qui avait fait l’objet d’un théorique Essai génétique sur les races, les peuples, les nations, la démocratie (1959), où il dénie tout fondement scientfique à l’idée de race.

Le Manifeste contre le racisme relie le racisme au colonialisme et propose de parachever la décolonisation par un combat antiraciste. Ce dernier livre édité de Tazerout est le plus dense, car il est aussi un bilan de l’ensemble de son œuvre dont les conclusions lui servent à élucider le racisme qui, en tant que séquelle du colonialisme, constitue un des obstacles à l’apaisement des relations entre peuples qu’avaient opposés des guerres de religion, des luttes de classes et des conflits. On sait que l’œuvre de ce diplômé du Cours normal de Bouzareah pour indigènes s’est achevée par une traduction du Coran encore inédite.

Son étude des grandes civilisations lui a permis de passer des problèmes locaux à l’histoire universelle. En traduisant le Livre fondateur de l’islam, il entendait faire connaître la « fraternité adamique », prescrite par ce texte antiraciste. L’humanisme musulman lui paraissait être une contribution possible du monde musulman à débarrasser l’humanité du racisme colonial qu’il avait fui pour s’« auto-désindigéniser ».